Ce chemin, cette « voie », il y a bien longtemps qu’Edmée Delsol la suit. Seule, hors des sentiers battus, en connivence avec la Grande Déesse Nature.
Depuis sa jeunesse, depuis l’enfance, depuis toujours peut-être ? Depuis des temps immémoriaux même, comme une humanité en quête d’essentiel.
À travers cimes et vallées, c’est un chemin de terre sinueux qui conduit aux pentes les plus abruptes et nous fait vaciller au bord des abîmes. Un chemin qui, durant de longs jours d’un épuisant voyage dans l’argile boueuse et froide, mène à quelque ruisseau dont l’eau pure surgit de sources profondes, renvoyant tendrement la clarté céleste.
Franchissant ces espaces infinis sur d’ancestrales « embarques », Edmée Delsol parvient ainsi à atteindre d’autres rives, invitée aux noces chymiques de la terre et du verre.
Au fil des saisons, interminablement son cheminement se poursuit à travers de vastes plaines et d’oniriques jardins, où les nuages et le vent se mêlent à la poussière des étoiles.
Une errance où alternent l’ombre et la lumière, où les opposés ne cessent de se concerter, l’impulsion, le doute et l’hésitation de se faire écho. De brisures en réconciliations, les fragments s’organisent, des liens se créent, des passages se forment, les équilibres s’ajustent puis se rompent pour donner plus de densité encore aux formes et à la finesse des impressions qui en émanent.
Fusion des éléments, transmutation de la matière, alchimie des couleurs, métamorphoses de l’âme.
Par cette union sacrée de la terre et du verre, Edmée Delsol s’exprime dans une langue qui n’appartient qu’à elle mais à laquelle pourtant chacun peut accéder car c’est une langue universelle. Celle que l’on entend dans la pureté austère de l’abbaye cistercienne ou dans la simplicité du bouddha couché, caché depuis de longs siècles dans quelque grotte himalayenne. Celle d’une beauté dépouillée qui vous laisse coi et que seule la poésie sait rendre.
Mais c’est surtout la langue commune à tous ceux qui, un jour, ont oser s’aventurer sur le vertigineux chemin qui descend au plus profond de soi. Comme Dante pour y retrouver Béatrice, comme Maître Eckhart et comme aussi tous les véritables créateurs. Un chemin difficile, éprouvant, où se succèdent morts et résurrections.
La voie « juste », la voie du milieu, celle de l’équilibre précaire et du clair-obscur, celle qui, à la fois, révèle la fragilité de la Créature et mène à sa vérité profonde et à son unicité. La voie qui conduit vers l’humanité la plus authentique et donne son vrai sens à la vie.
C’est sur ce chemin qu’Edmée Delsol nous invite à la suivre, une « voie » faite de terre et de verre, savamment colorée, d’une subtile beauté.
Viviane Thibaudier